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Petite histoire de la mode

La mode au XXème siècle

samedi 29 mai 2010, par pierre royneau

Introduction

Jusqu’au milieu du 19ème siècle, les modes successives se distinguent clairement en fonction des époques. Puis, la mode va s’organiser autour de marques et de créateurs individualisés. Cela coïncide avec l’émergence de l’industrie et de la confection de la révolution industrielle. Depuis cette époque, les caractéristiques vestimentaires sont directement liées aux mutations qui affectent les modes de vie et les valeurs de la société. Plusieurs phénomènes expliquent ces changements :
- le développement de l’industrialisation textile et la mécanisation progressive des modes de fabrication,
- le perfectionnement des techniques de teinture,
- l’apparition de l’industrie de la confection qui va offrir à la clientèle un choix beaucoup plus important de tenues et permettre un renouvellement plus rapide des lignes.

Et pour commencer, une petite vidéo retraçant l’histoire de la mode en vitesse rapide : Mode En France History Of Fashion Sequence , extrait du documentaire de William Klein "In et Out of Fashion" de 1976
Flash Video - 12 Mo

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Charles Frédérick Worth, l’inventeur de la haute couture

La haute-couture (ou couture-création) apparaît en France pendant le second Empire. Un Anglais, Charles Frédérick Worth (1825-1895), avec l’appui du pouvoir en place, va fixer les règles de la haute-couture parisienne.
Pour la première fois, un couturier propose à ses clientes des modèles préalablement réalisés. En effet, plutôt que chaque "élégante" élabore ses modèles, Worth propose ses propres réalisations que les clientes admirent sur des "sosies", nom donnée aux mannequins de cette époque. Tissus, couleurs, motifs, formes, évoluent selon les saisons et les modèles (appelés les "confections") sont proposés, vendus puis réalisés par l’atelier de couture selon les morphologies personnelles des acheteuses.
La contribution majeure de Worth à la haute-couture réside particulièrement dans son sens remarquable du commerce qui va faire évoluer la couture en une industrie du luxe. Il est en effet le premier à vendre ses modèles au-dessus de leur prix de revient.
Le style de Worth, en revanche, ne révolutionne pas de façon remarquable le vêtement féminin. Ses robes utilisent ainsi la crinoline, avec plusieurs modifications successives, pour progressivement se concentrer vers l’arrière (en "demi-terme"). Ainsi, l’ancien idéal persiste : la femme doit avoir une "taille de guêpe" (renforcée par l’utilisation d’un corset et d’un corsage ajusté).
Les modèles de Worth favorisent une mode ostentatoire et luxueuse, répondant aux aspirations de sa clientèle, désireuse de faire valoir ses privilèges. Les tissus sont somptueux, les modèles se parent de rubans et de passementeries. Cela va stimuler l’industrie de la soie et de la dentelle et favoriser le développement des accessoires (bijoux, fichus, châles, sacs et chapeaux).

Charles Frédérick Worth - Élisabeth d'Autriche habillée par Worth.

Charles Frédérick Worth - Robe de jour (1883-85)

Charles Frédérick Worth - Robe de bal (1885)

Comtesse de Greffuhle dans une robe du soir de la maison Worth - 1886

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La belle Époque (1900-1914)

La mode au 19ème siècle demeure essentiellement l’affaire de Paris et suit étroitement les règles d’un certain jeu social, seuls les plus riches pouvant s’offrir les vêtements sur mesure d’une maison de couture. Toutefois, avec la l’industrialisation, les journaux de mode (comme Le Petit Écho de la Mode qui a largement contribué à faire évoluer les tenues et les habitudes vestimentaires) et les maisons de couture vont se développer.
En 1900, parmi les grands noms de la couture parisienne, et dans une certaine mesure de Londres, on trouve, entre autres, la maison Worth (dirigée désormais par ses des deux fils), son grand rival Jacques Doucet, Jeanne Paquin, les Sœurs Callots.
La mode féminine de cette période se caractérise par une silhouette très féminine, privilégiant les formes souples, les courbes, les dentelles, dans l’esprit direct de l’Art Nouveau. La silhouette s’élance, s’affine.
Les vêtements perdent progressivement de leur ampleur, en abandonnant la crinoline pour la tournure puis en donnant du volume aux jupes à l’aide de simples jupons. Ainsi, dans un premier temps, grâce à de nouveaux corsets, les fesses sont projetées vers l’arrière, les reins sont très cambrés et les femmes affichent une silhouette dite en S. Puis, avec un renforcement de la lutte pour la libération de la femme et le développement des tenues de sport, le corset est abandonné au profit de culottes bouffantes (les bloomers) et de jupons.
Les décolletés deviennent pigeonnants et les dessous sont mis à l’honneur avec des dentelles, rubans et autres frous-frous qui embellissent les sous-vêtements. Les lignes se simplifiant, les accessoires principaux sont le chapeau, s’affublant des décorations diverses (fruits, plumes, fleurs ...), l’ombrelle et l’éventail.

Jacques Doucet hérite d’un commerce de bonneterie et de lingerie rue de la Paix à Paris et il décide de fonder une maison de couture sur le modèle de Worth.
Premier couturier à s’imposer socialement, il va habiller les dernières Élégantes dont la vie était rythmée par les sorties, les réceptions, ainsi que les actrices en vogue (Réjane, Sarah Bernhardt, La Belle Otéro, Liane de Pongy ...).
Les toilettes réalisées par Doucet (robes d’intérieur, négligés, déshabillés mousseux), sont caractérisées par une couture sur mesure et, par fidélité à la tradition familiale, comportent des dentelles (souvent anciennes) et des ornements de lingerie. Elles se construisent avec des matières légères, fluides et translucides leurs conférant une forte empreinte féminine.
Son travail évoque les Grâces du 18ème siècle et les peintures de Watteau, mais aussi les chatoiements impressionnistes grâce à des superpositions de coloris pastels.

Jacques Doucet - Robe - v. 1900

Jacques Doucet - Robes - v. 1900

Jacques Doucet - Détail d'une cape du soir - v. 1905

Formé chez Doucet et Worth, Paul Poiret ouvre en 1904 une maison résolument nouvelle dans sa façon de penser la mode. À partir des années 1910, Poiret amorce ainsi une simplification du vêtement féminin (qui caractérisera les modes de l’après première guerre mondiale).
Visionnaire, Poiret va proposer des silhouettes très différentes de saison en saison, et va, de cette façon, accélérer le rythme de la mode. En 1911, il brise le monopole des parfumeurs en étant le premier couturier à lancer son propre parfum Rosine qui emprunte le nom de sa fille. La même année, il crée La Maison de Martine, du nom de sa deuxième fille, dédiée aux arts décoratifs où vont être développés et commercialisés de multiples accessoires destinés à l’habitat. Il est également le précurseur de la communication de mode et de la publicité et organise des fêtes et des spectacles qui assurent sa renommée.
Les débuts du couturier sont fracassants, faisant déjà scandale de 1901 à 1904 chez Worth (maison encore attachée à des traditions périmées) en proposant des robes simples.
En 1908, il impose des jupes tombant à 5 ou 6 centimètres du sol en un drapé souple, telle une colonne. La taille est placée sous la poitrine, rendant inutile l’usage du corset au profit de hautes ceintures renforcées de baleines. Poiret plaide ainsi en faveur de ce qu’il juge être la beauté naturelle, montrant davantage un corps féminin naturellement svelte.
En 1909, avec la première session parisienne des Ballets russes, puis en 1910, avec le succès du spectacle Schéhérazade qui provoquent une vague d’orientalisme, Poiret fait évoluer ses inspirations et rénove notablement son univers décoratif. Ses couleurs deviennent flamboyantes (avec des dominances de mauves, lilas, violets, oranges foncés, rouges, verts bouteille) et s’opposent aux palettes en demi-teintes de l’époque. Ses tenues s’agrémentent également de paillettes, perles, fil d’or et d’argent. Empruntant à tous les exotismes, Poiret développera des robes tuniques, des pantalons bouffants, des manteaux à la coupe kimono ...
La Maison Poiret, ne prenant pas véritablement en compte les changements profonds des modes de vie des femmes de l’après-guerre ferme ses portes en 1926.

Paul Poiret - Ensemble -1913

Paul Poiret - Robes

Paul Poiret - Manteau Fancy - 1911-12

Paul Poiret - Orientalisme

Célèbre surtout à travers ses créations de tissus et de robes, Mariano Fortuny est aussi un technicien et un artisan qui a exercé ses talents dans des domaines divers tels que la peinture et la photographie, en passant par la conception d’objets mécaniques et la scénographie.
Son inscription dans l’histoire de la mode est due principalement à son fameux plissé Fortuny, plissé permanent et irrégulier dont la technique a disparu avec son inventeur.
Ses robes fourreau Delphos, longues, moulantes et souples, sont des pièces uniques réalisées en soie d’une extrême finesse. chacune d’entre elles a sa propre couleur obtenue par des bains successifs dans des teintures importées telles que la cochenille du Mexique, l’indigo de l’Orient ... et conférant au vêtement des jeux subtils de teintes dégradées. Inspirée du chiton grec classique (tunique datant de l’Antiquité), cette robe tombe au sol en une longue colonne chatoyante. La Grèce antique et l’Orient inspireront Fortuny pour la réalisation de ces robes pouvant être maintenues par une cordelette de soie et lestées de façon décorative de perles de verre de Murano ajustées autour du cou et des bras. _ Des artistes émancipées de l’époque comme Sarah Bernhardt, Isadora Duncan étaient clientes de Fortuny, appréciant ses fastueuses robes légères pseudo-classiques.

Dans les années 1980, le styliste japonais Issey Miyake reprendra cette exploration des techniques de plissé pour sa collection Pleats Please.

Mariano Fortuny - Natacha Rammbova dans une robe Delphos de Fortuny - v. 1924

Mariano Fortuny - Robe - Fin des années 20

Mariano Fortuny - Robe de soirée - 1920

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La mode pendant la première guerre mondiale (1914-1919)

Lorsque la guerre éclate en août 1914, la vague d’extravagance orientale prend aussitôt fin.
La mode se fait plus sobre et s’oriente vers la commodité, le confort et la simplicité. Les hommes étant absents, les femmes accèdent à de nouvelles responsabilités. Contraintes de travailler, elles exigent des tenues adaptées à des activités nouvelles. Elles revêtent l’uniforme, s’habillent de jupes plus amples qui découvrent le mollet ou adoptent un style pratique emprunté aux garçons, certaines portant même le pantalon. La période étant grave, les couleurs s’assombrissent et tendent à la monochromie.

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Les années Folles (1920-1929)

Pendant les années d’après-guerre, les femmes vont adopter de nouvelles silhouettes, expression d’une volonté de libération et d’émancipation. Les grands créateurs, après quelques tâtonnements imposent le silhouette à la garçonne.
Les robes sont raccourcies de façon audacieuse, largement décolletées à l’arrière et réalisées à l’aide de nouvelles étoffes (mousseline, kacha, tussor, shantung naturel). Les seins sont comprimés par des bandeaux. La taille est peu marquée, le corset étant définitivement abandonnée. Les chapeaux lourdement ornés de l’avant-guerre disparaissent au profit du chapeau cloche. Les chaussures sont désormais visibles et souvent d’une couleur coordonnée à la tenue. Les femmes portent des cheveux courts (parfois gominés) et ont les sourcils épilés. Elles se maquillent de manière artificielle à l’aide de couleurs vives et utilisent de longs fume-cigarettes.
Les valeurs traditionnelles sont ébranlées. La modernité est en marche.

Jeanne Lanvin ouvre une maison de modiste en 1885 rue Boissy d’Anglas dans le 8ème arrondissement. Puis, à partir de sa spécialité de chapeaux, elle va développer des collections de couture et, progressivement, la maison Lanvin va devenir un véritable empire.
Dans les années 1900, Jeanne Lanvin crée pour sa fille des tenues séduisantes qui vont la faire remarquer de riches clientes. C’est ainsi qu’elle va donner bientôt à la mode féminine un aspect juvénile et la maison Lanvin va connaître un succès particulier avec ses robes assorties pour mère et fille.
La couturière aime les décorations romantiques, les broderies, les froufrous ... Elle agrémente ses créations de perles, d’entrelacs de passementerie, d’ornementations brodées de style art déco. Ses toilettes ont généralement des coupes aux lignes épurées et ses silhouettes sont fluides et longilignes.
Voyageant énormément, Jeanne Lanvin met au goût du jour des toilettes aux influences orientales en 1909. Elle s’inspire des drapés indiens, des broderies égyptiennes et des étoffes persanes. Pendant les années 1920, elle se tourne vers les broderies aztèques et les pyjamas de soirée. Ayant une prédilection pour les motifs positifs/négatifs, ses robes de style jouent sur le contraste entre mat et brillant, opacité et transparence, couleurs poudrées et teintes nocturnes, matelassé et dentelle, velours et tulle.
Les robes de Jeanne Lanvin, sans révolutionner notablement la mode de l’époque, affiche un raffinement exceptionnel et s’adaptent bien à l’air du temps.

Jeanne Lanvin - pub de Paul Iribe - 1927

Jeanne Lanvin - robe 1920-25

Jeanne Lanvin - robe et ceinture - 1927

D’emblée Jean Patoul va diversifier ses créations et se consacrer, entre autre, à un style préfigurant le sportwear. Dans un soucis de fonctionnalité et, simultanément de luxe, il donnera aux femmes une nouvelle sensation de liberté tout en exaltant leur féminité. Ses tenues affichent ainsi des lignes pures, des motifs géométriques, voire cubistes, un look décontracté.
Sa palette colorée restreinte, basée sur le bleu et le blanc et dominée par toutes les nuances de beige, va trouver dans la championne de tennis Suzanne Lenglen sa plus grande ambassadrice. C’est pour elle que Jean Patou créera le premier short de tennis féminin. Les bas roulés masquant partiellement les jambes de la championne seront désapprouvés par les membres conservateurs de la haute société.
Jean Patou est le premier créateur de mode à dessiner des cardigans en jersey et des maillots de bain en tricot, à fabriquer des accessoires assortis à la tenue. Autre fait marquant, il est le premier à apposer ses initiales (monogramme JP) sur ses créations. Gage de publicité, Jean Patou obtiendra un très bon succès commercial aux États-unis.
Imposant des tenues à l’esprit pratique pour le tennis, le golf, la montagne, Jean Patou inspirera en partie les tendances novatrices de l’époque et le travail de Chanel, tout en restant toujours dans l’ombre de cette exceptionnelle créatrice de mode.

Jean Patou - Tenue portee par Suzanne Lenglen - 1926

Jean Patou - Robes sans manche - 1929

Jean Patou - Tenue pour Suzanne Lenglen

Gabrielle Chanel va développer un style sobre et pratique, devenant rapidement le symbole du vêtement féminin adapté à la vie moderne. Démocratisant la mode, Chanel va simplifier le vêtement féminin, lui conférant un style sobre et pratique, répondant aux nouvelles envies des femmes urbaines.
Gabriel Chanel propose, à partir de 1921, dans sa maison ouverte au 31 rue Cambon, une silhouette avec des emprunts aux univers sportifs (maillots de bain ...), à la mode masculine (pantalon, cravate, cheveux courts) et du travail (jersey, marinière, gilet).
Sur le modèle de la garçonne, les femmes s’affirment et s’émancipent. Chanel, elle-même sportive, veut des éléments plus confortable que la tenue traditionnelle guindée. Ainsi porte-t-elle souvent un étroit pantalon d’homme accompagné d’un chemisier simple ou d’une marinière.
Venant d’un milieu modeste, Chanel a une aversion pour l’excès de luxe et d’ornements. Elle associe ainsi à ses coupes simples de nouvelles étoffes. Elle achète à la société Rodier un reste de jersey beige (tissu employé jusque là pour pour les vêtements de sport, les tenues de travail et les sous-vêtements) et va l’utiliser pour fabriquer ses robes à bretelles et ses vestes.
Chanel va favoriser la jupe de couleur unie associée à un pull-over ou une veste et à un corsage blanc à col Claudine (petit col à pointes arrondies). La tenue est agrémentée d’une simple foulard et de quelques bijoux. Elle va développer également des robes-chemisier où elle remplace la ceinture par une écharpe nouée sur les hanches, faisant paraître la tenue plus simple tout en lui donnant une note d’élégance.
En 1920, elle créera sa fameuse petite robe noire qui sera souvent réinterprétée, jusqu’à aujourd’hui.
Dans les années 1950 et 1960, le tailleur Chanel voit le jour. Considéré comme l’archétype de la mode Chanel, il s’agit d’un tailleur sobre en tweed ou en tissu bouclé coloré. Composé d’une veste carrée sans col aux bords garnis d’une ganse tressée, il se ferme à l’aide de chaînettes ou de boutons dorés. Cette veste est portée avec une jupe de forme légèrement évasée à quatre lés et coupée juste en dessous de genou.

Coco Chanelle - Tailleur en jersey - taille basse - jupe plissée - chapeau cloche - v. 1925

Gabrielle Chanel - robes - avril 1926

Gabrielle Chanel en pantalon large et mariniere. Tenue unisexe qu'elle avait pensé à ses mesures - 1930

Gabrielle Chanel - Petite robe noire - 1926

Gabrielle Chanel - Tailleur en Tweed

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Les années glamour (1930-1938)

Avec le krach boursier de Wall Street en 1929 et la crise économique qui suit, de nombreuses fortunes s’effondrent, le chômage et la pauvreté se répandent. Cela a, bien sûr, un impact considérable sur le monde la mode.
Les femmes des années 1930 s’éloignent des lignes de la décennie précédente. En rupture avec la mode androgyne qui prévalait jusqu’alors, la silhouette devient beaucoup plus sinueuse, souple, élancée, avec des hanches fines, une taille marquée et des épaules larges. Les vedettes hollywoodiennes (Marlene Dietrich, Joan Crawford, Greta Garbo, Jean Harlow) symbolisent l’image de cette nouvelle femme , grande, épanouie, romantique.
Les lignes évoquent le style Belle-Époque. Les femmes s’habillent de longues robes moulant la taille qui s’évasent jusqu’au sol, rappelant, dans une certaine mesure, la tournure. Les tenues se chargent de dentelles, de volants. Les épaules se parent d’amples manches bouffantes, de boléros de fourrure.
La généralisation du soutien-gorge et de la gaine permet de proposer des modèles à la taille marquée et à la poitrine soulignée. _ Les cheveux des femmes restent courts, mais sont désormais ondulés. La mode du bronzage, signe de bonne santé fait son apparition.

Madeleine Vionnet fonde sa maison rue de Rivoli en 1912.

Inspirée par les drapés de la statuaire antique grecque, Madeleine Vionnet propose une silhouette fluide et très féminine. Les robes de la créatrice affichent une silhouette longiligne et altière, leurs lignes naturelles épousant le corps de façon très sensuelle et offrant une réelle liberté de mouvement. Cette sensualité est renforcée par l’abandon du corset par Madeleine Vionnet qui est la première créatrice de mode à s’en passer systématiquement.
Ses robes dégageant une sensation de souplesse, d’apparente simplicité, sans surcharge, nécessitaient toutefois de longues recherches et plusieurs phases successives de taille et de drapé.
Madeleine Vionnet utilise de façon privilégiée des étoffes fluides, impalpables telles que la mousseline, la soie ou le crêpe marocain, afin de renforcer l’aspect flou et voluptueux de ses tenues et insister sur le dialogue corps/vêtement.

Madeleine Vionnet

Madeleine Vionnet - Robe - hiver 1920

Madeleine Vionnet - Robe du soir - hiver 1935

À la même époque, Elsa Schiaparelli se distingue par le côté novateur de ses collections. Travaillant parallèlement à l’évolution des Beaux-Arts, elle se lie avec Marcel Duchamp, Picabia, Man Ray, Stieglitz et collabore avec Salvador Dali. Le surréalisme, une de ses sources d’inspiration majeure, est traduit en tissu et en laine dans des modèles d’une grande originalité.
D’esprit avant-gardiste, Elsa Schiaparelli joue sur la surprise et développe un style ludique et excentrique. Emprunts d’une grande théâtralité, ses créations utilisent la symbolique et le détournement de fonction.
La couturière crée ainsi un pull-over en maille noire ornée d’une cravate en trompe l’oeil, une robe imprimée de guenilles, une autre imprimée d’un énorme homard, une tenue à tiroirs dans l’esprit de Dali,ou encore un chapeau en forme de chaussure. Elle fait broder des mains enserrant la taille, crée un collier-insecte et introduit pour la première fois des fermetures éclairs colorées en guise de décoration et des matières synthétiques (viscose, rayonne, cellophane transparent).
En 1937, elle lance son parfum Schocking dont le flacon reprend les mensurations de l’actrice hollywoodienne Mae West et qui inspirera plus tard Jean-Paul Gaultier. La couleur de la boîte est le rose shocking, adjectif encore utilisé aujourd’hui pour parler de cette teinte de rose chaud, couleur favorite de Elsa Schiaparelli qui l’a largement utilisée dans ses créations allant jusqu’à en teindre des fourrures.

Elsa Schiaparelli - Pull-over trompe l'oeil

Elsa Schiaparelli - Tailleur avec poches à effets de tiroirs en trompe l'oeil - 1936-37

Elsa Schiaparelli - chapeau-chaussure - collection circus

Elsa Schiaparelli - Flacon de parfum Shocking

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Système D (1939-1945)

La seconde guerre mondiale entraîne une ère de minimalisme forcé. Les restrictions touchent également le monde du textile et vont interdir les grands métrages et les parements. La soie et le nylon (introduit en 1938) sont réquisitionnés pour fabriquer des parachutes. Les balles de golf sont transformées en masques à gaz et les matelas en gilets de sauvetage. Seuls restent des tissus comme la rayonne et la viscose pour s’habiller. En France et en Angleterre , des couturiers comme Hardy Amies, Edward Molyneux, Jeanne Lanvin s’efforcent de produire des vêtement à la fois bon marché et de qualité.
Une soixantaine de maisons parisiennes est "délocalisée" en partie à Berlin ou à Vienne. Les couturiers qui restent à Paris doivent être excessivement vigilants. Ainsi, lorsque Mme Grès drape ses modèles de bleu, blanc, rouge, les Allemands l’obligent à fermer sa maison.
Les tenues se font plus austères, plus martiales. Les formes évoluent, s’inspirant des modèles militaires. Les épaules sont accentuées par l’introduction de renforts (les Paddings) et se dotent parfois même de pattes. Les vêtements sont souvent portés ceinturés et les vestes sont droites. Les robes deviennent plus courtes et plus sages, afin d’utiliser moins de tissu. Les robes offrent des formes plus larges afin de faciliter la pratique du vélo et les tailleurs sont nets et boutonnés. L’époque est aux étoffes solides et chaudes comme le Tweed.
La création se réfugie dans les coiffes, plus faciles à agrémenter. Les femmes font preuve d’imagination par rapport à la pénurie des matériaux et se constituent des chapeaux fantaisistes, décorés de voilettes, de fleurs, de plumes. On voit également se développer les fichus, les turbans, servant souvent de "cache-misère" ainsi que les petits feutres, eux aussi d’aspect militaire, plus pratiques que les chapeaux. Celles qui se dispensent de chapeau se coiffent en relevant leurs cheveux en une sorte de coque au-dessus du front. Les permanentes étant difficiles à effectuer en ces temps difficiles, les cheveux sont maintenus en boucles et rouleaux grâce à des épingles à cheveux.
Les bas sont désormais inabordables. Aussi les femmes brunissent-elles leurs jambes artificiellement et dessinent parfois une fausse couture au crayon à sourcils.

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New-Look et féminité (1946-1959)

Au lendemain de la guerre, la mode n’évolue pas beaucoup. On conserve les robes et les tailleurs courts, étroits, stricts, avec des épaules marquées et une ligne un peu raide.
Paris doit alors prouver qu’elle est toujours la capitale de la mode. La Chambre syndicale de la couture parisienne décide d’organiser une exposition itinérante à laquelle plus de cinquante maisons vont participer. Cependant, le secteur de la mode ne faisant pas partie du plan Marshall et les matières premières étant toujours difficiles à trouver, le Théâtre de la Mode va consister à présenter plus de 200 poupées de 70 cm de haut. Ces mannequins de fil de fer seront habillées de tenues haute-couture méticuleusement façonnées, des sous-vêtements aux accessoires. Cette exposition va faire une tournée en Europe et aux États-Unis et démonter que la mode parisienne se porte toujours bien. Certains modèles affichent de nouvelles lignes, plus douces et plus élancées, marquant un désir d’en finir avec les profils carrées des années de guerre.

Théâtre de la mode - 1945

Ainsi, si l’austérité prévaut encore dans l’immédiate après-guerre, les couturiers vont rapidement adoucir les lignes pour créer une ligne plus fine, plus romantique. La mode devient alors plus fastueuse. La silhouette est exagérée, les courbes sont soulignées et le style rappelle l’image traditionnelle des femmes de la fin du 19ème siècle. La mode redevient hyper-féminine.
Deux couturiers vont dominer cette période : Christian Dior et Cristobal Balenciaga.

Christian Dior est le premier à révolutionner la mode européenne. En 1947, lors de son premier défilé, il présente des modèles que la presse américaine va baptiser New-Look .
Ses vêtements se construisent autour d’épaules étroites et tombantes, une taille de guêpe excessivement fine, des hauts ajustés. Les jupes se rallongent jusqu’au mollet et sont amples et fluides. Les femmes se chaussent de chaussures à talons aiguilles gracieuses.
Les sous-vêtement jouent un rôle majeur dans la construction de cette silhouette. Les soutiens-gorge remontent la poitrine (en 1954, Dior l’exhausse de 6 cm) et ont des bonnets à piqûres concentriques donnant aux seins une forme pointue. Les femmes portent à nouveau des sous-vêtements destinés à sculpter leur corps : bustiers à armature, guêpières ou gaines qui compriment le ventre, arrondissent les hanches et maintiennent leurs bas. Le nylon se répand et permet la démocratisation de la lingerie.
Cette nouvelle mode exige des métrages d’étoffe importants et des tissus plus luxueux. Les modèles de Christian Dior exigent entre 10 et 25 mètres de tissu. Certaines de ses robes du soir nécessitent jusqu’à 80 mètres de tissu.
Les critiques sont virulentes, un tel luxe étant gênante dans une Europe en pleine reconstruction. En raison de son allure sensuelle et des contraintes imposées au corps, le New-Look est accusé d’être une tentative de réduire la liberté de la femme. Toutefois, ces reproches sont vains et cette mode va se diffuser très largement.
La mode des années 50 se caractérise par une créativité effrénée, Christian Dior présentant à sa clientèle de nouvelles lignes à chaque saison. Les lignes se succèdent : la ligne Zig-Zag en 1948, Verticale en 1950, Tulipe en 1953, Muguet en 1954 (taille serrée et jupe plissée en soleil), ligne H, A (qui s’évase légèrement) et Y (très ajustée jusqu’à l’ourlet) de 1954 à 1955. En 1956, il définit la ligne Flèche où l’axe du corps est caché par un haut tombant mais ouvert sur la ceinture de la jupe. Dior crée sa dernière collection, autour de la ligne Fuseau avant sa mort en 1957.

Christian Dior - Tailleur - 1948

Christian Dior - robe de cocktail - v. 1950

Christian Dior - Tailleur ligne A - printemps 1955

Pierre Balmain ouvre sa première maison en 1945. Il adopte un style à la fois simple et distingué qui donne naissance au personnage de la Jolie Madame parisienne . Ses tenues sont constituées de petites robes à tournures (pièces de lingerie destinées à accentuer la chute des reins) et de petites toilettes brodées.
La ligne de Balmain, moins sensationnelle que celle de Dior, présente toutefois des vêtements élégants, résolument chics, luxueux et glamour. La maison Balmain, réputée pour ses somptueuses toilettes de soirée, devient la griffe attitrée des stars (Marlène Dietrich, Michèle Morgan, Katharine Hepburn, Brigitte Bardot, Sophia Loren, Dalida) et des Reines (du Danemark, de Belgique, de Thaïlande).
Utilisant des matières telles que le satin, le velours brodé, l’organza ou la mousseline de soie, Balmain décline des bustes à la poitrine épanouie et à la taille solidement serrée dans une bustier baleiné, et des jupes d’une très grande ampleur déclinées en couleurs tendres et en tons délicats.
Le couturier agrémente également volontiers ses modèles de bijoux luxueux afin de renforcer encore l’atmosphère romantique se dégageant de ses créations.

Pierre Balmain - Robes - 1950

Pierre Balmain - Robe du soir brodée - v. 1950

Pierre Balmain - Robes - 1957

Jacques Fath n’a pas de formation dans la mode. Étudiant en comptabilité, il fréquente un cours de théâtre et dessine des projets de décor. Il se tourne vers la mode en 1937 et fonde sa maison dont la renommée grandit dès la fin de la guerre.
Après la guerre, il devient un personnage mondain, fait des robes pour les stars. il compte parmi ses clientes Ava Gardner, Greta Garbo et Rita Hayworth pour qui il dessine une robe de mousseline de soie bleue pour son mariage avec le Prince Aly Khan en 1949.
Ses modèles sexys et élégants, subtilement provocants, sont davantage destinés à des femmes grandes et sveltes, tentées par le glamour un peu piquant des robes moulantes à fourreau. Jacques Fath accentue la dynamique de ses modèles en jouant sur les plis, les asymétries. Certaines tenues s’agrémentent de gigantesques nœuds (disposés dans l’oblique par exemple) et d’ornements audacieux.
Les tenues de Balmain se caractérisent par des paddings apparents dépassant les épaules, des manches larges, des drapées dans la partie inférieure de la robe, des chasubles élargissant la carrure et affinant la taille et des manteaux agrémentés de cols hauts et larges encadrant le visage.

Jacques Fath - 1951

Jacques Fath - 1953

Jacques Fath - 1955

À voir cette petite vidéo sur Youtube :
> Jacques Fath - 50’s fashion clip

Cristobal Balenciaga ferme sa maison espagnole quand la guerre civile ravage le pays. Il émigre à Paris en 1936 et ouvre sa maison l’année suivante avenue Georges V où il va créer des vêtements raffinés et ajustés de façon rigoureuse, soulignant les contours du corps.
Dès sa première collection les clientes comme la presse sont enthousiastes. On parle de ses petites robes noires parfaites, de sa coupe irréprochable, de ses couleurs chatoyantes et de ses robes du soir. Déjà on le baptise déjà le "couturier des couturiers".
Ses créations, aux influences espagnoles récurrentes, puisent une part de leurs racines dans les peintures des tableaux de Velázquez, Zurbaran ou Goya, mais aussi dans les spectacles de corridas, de flamenco et dans le rituel de l’Église catholique romaine. Parmi les premiers produits iconiques de la marque ont trouve ainsi des boléros brodés.
Dans les années 50, les modèles qu’il dessine sont différents des lignes si caractéristiques de Dior et de son New-Look où les femmes sont gaînées et parées de crinoline. Balenciaga propose pour sa part des lignes fluides et modifie la façon dont le vêtement et lié au corps. En 1951, son tailleur semi-ajusté, (cintré devant et vague derrière) est l’antithèse du New-Look. En 1953, il introduit la veste sphérique ballon. Ce sont les débuts du corps qui se libère.
Il poursuit dans cette voie en créant en 1955 une robe tunique qui ne fait qu’effleurer le corps puis, en 1957, il sort sa robe-sac au style simple et leste. Cette robe droite de lainage marine tombe sous le genou. Caractérisée par un col rond et deux poches diagonales, elle se ferme à l’aide d’une fermeture éclair centrale située dans le dos.
Balenciaga ne cesse d’inventer de nouvelles formes tout au long de sa carrière. En quête de jeux de lumière et de volumes, il collabore avec un fabricant de tissus suisse et utilise le gazar d’Abraham, une toile "magique" qui se maintient sans artifices.

Cristobal Balenciaga - Robes - 1951

Cristobal Balenciaga - Jupe bustier et sur jupe - 1951

Cristobal Balenciaga - Robe du soir - 1954

Cristobal Balenciaga - Robe sac en laine - 1959-60

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Les années Pop (1957-1967)

La période courant sur les années 1960 est une phase révolutionnaire dans la création vestimentaire. L’image de la femme apprêtée des années 1950, aux formes très dessinées, s’estompe au profit d’une silhouette plate et plus géométrique.
Les jeunes désirent avoir une mode différente de celle de leurs parents, symbole d’une vie raisonnable faite de confort et de bienséance, et consacré au travail et à la famille. Les sous-cultures explosent ; les Mods, Rockers, Blousons noirs, Yéyés se suivent et se côtoient durant cette décennie.
En opposition aux interdits bourgeois et à la pudibonderie s’ajoute un désir d’émancipation de la femme. Le cinéma révèle des femmes audacieuses, sensuelles et voluptueuses. Marylin Monroe, Sophia Loren, Brigitte Bardot crèvent les écrans. La pilule est légalisée en 1967, assurant l’égalité sexuelle aux femmes.
Ces changements socio-culturels vont avoir un impact notable sur le monde la mode. La bourgeoise cède la place à la femme-enfant aux allures naïves (le mannequin Twiggy en est l’exemple typique). Il faut être jeune et sexy à tout prix. Les femmes, devenues actives, recherchent des vêtements qui favorisent la liberté de mouvement. La robe-sac de Balenciaga participe à l’émergence de formes beaucoup plus simples.
Les années 1960 favorisent l’audace.

Twiggy en robe dos nu transparent

Cette Anglaise propose dans les années 1960 une mode jeune et bon marché, héritée de la culture pop et opposée à la haute couture élitiste. Mary Quant dessine en 1958 sa première mini-robe dont l’ourlet s’arrête au-dessus du genou. À partir de 1965, le raccourci est beaucoup plus important et devient un phénomène de mode que vont largement promouvoir Mary Quant en Angleterre et André Courrèges an France.
La mini-jupe fait fureur durant les années 60, malgré son ambiguïté due à son l’expression d’une certaine liberté sexuelle en même temps que d’une provocation du désir masculin et de la surexposition affichée de la femme-objet.
Mary Quant crée également, pour présenter ses modèles, de véritables évènements scéniques mis en musique, prémices des présentations modernes des défilés de mode.

Mary Quant recevant la médaille de la Socity Artists end Designers - 1965

Mary Quant - 1963

Les créations de Mary Quant - 1967

Formé chez Balenciaga, André Courrèges ouvre sa maison en 1961. Il est le premier créateur haute-couture à se servir du phénomène mini skirt lancé par Mary Quant et fait de la mini-jupe la pièce phare de sa collection printemps-été 1965. Cette dernière lui apporte la célébrité avec des robes architecturées, coupées en trapèze et s’arrêtant à mi-cuises sur des bottes courtes, et réalisées dans des tissus secs, blancs ou pastels.
Son style, très caractéristique, affirme des parti-pris très marqués : ses modèles portent des mini-jupes associées à des collants (qui remplacent les bas) ou des pantalons, avec des bottes, des capes et des petits casques à l’allure futuriste. _ Les prototypes de Courrèges sont simples et structurés, sans plis ni pinces. Il intègre de préférence la maille et les nouveaux matériaux et les textiles synthétiques.
André Courrèges innove également en créant le pantalon à taille-basse, la combinaison en vinyle et des accessoires insolites tels que des perruques de couleurs, des lunettes blanches striées d’une meurtrière horizontale...

 André Courrèges - 1965

André Courrèges - 1968

André Courrèges- mini-robe et ensemble pantalon - 1968

André Courrèges

Pierre Cardin, formé chez Paquin, Lelong et Dior crée sa première entreprise de vêtements pour le théâtre et le cinéma et réalise les costumes de La Belle et la Bête et d’Orphée pour Jean Cocteau.
En 1949, il ouvre sa maison de couture et s’impose par des recherches de coupe et des déplacements de volume visant à modifier les formes traditionnelles. En 1959, il est le premier à produire un prêt-à-porter féminin à sa griffe.
Cardin révolutionne la mode à partir de 1950 avec des dimensions sculpturales, l’utilisation de nouvelles matières (comme le vinyle pour ses ensembles cosmonautes, des couleurs et des motifs empruntés au pop art et à l’op art. Ses formes construisent des silhouettes géométriques à base de ronds et de triangles, certaines robes étant percées de grandes découpes circulaires par exemple. Le modernisme de sa ligne trapèze est indéniable , avec des tenues qui ne s’appuient sur aucune partie du corps.
En 1969, alors que pour la première fois un homme pose le pied sur la Lune, Pierre Cardin crée la ligne unisexe Cosmocorps.

Pierre Cardin - Robes à décor géométrique - 1966

 Pierre Cardin - Cardine - robe en fibre dynel moulés - 1967

Pierre Cardin - manteau trapèze et chapeau hublot gansé de renard blanc - 1967

Pierre Cardin - Collection spatiale - 1968

D’origine espagnole, Paco Rabanne a déjà une bonne renommée en tant que créateur de bijoux fantaisie qu’il développe pour Balenciaga, Dior, Givenchy, avant de présenter ses premières collections couture.
En marge de la tradition de la mode, il est cependant un des créateurs les plus révolutionnaires du siècle dans le domaine vestimentaire. Il y introduit la notion de modernité en expérimentant de nombreuses nouvelles matières depuis l’ouverture de sa maison à Paris en 1967. Il construit ses tenues à l’aide de rondelles de plastiques, du non-tissé, de la maille métallique ... et est l’un des premiers à utiliser de la fausse fourrure. Créant des modèles à l’aide de matières atypiques, il désacralise ainsi les valeurs traditionnelles de la mode.
En 1966, il lance ses premiers vêtements métalliques (mini-robes ou mini-jupes). Puis, à chacune de ses collection il renouvelle les matériaux et les volumes de ses créations.
Dans les années 1970, il va continuer ses activités de concepteur moderne en créant des robes du soir théâtrales de plus en plus lyriques (bustier d’argent, ailerons en rhodoïd, casques profilés, collets d’acier ...).
Dans les années 1980, il s’ouvre à un univers baroque, parfois sulfureux et utilise des matériaux "recyclés" : disques compact, morceaux de bouteille plastiques, tubes de caoutchouc, tiges en inox.

Paco Rabanne en 1968

Paco Rabanne - Francoise Hardy en mini robe de plaques d'or incrustées de diamants reliées par des anneaux d'or - 1965

Paco Rabanne - Robe aluminium - 1968

Paco Rabanne - Mini robe en pastille métalliques - 1968

À 18 ans, Yves Saint-Laurent signe sa première collection. Remarqué pour ses talents de dessinateur, il entre l’année suivante chez Christian Dior comme assistant styliste. Lorsque Dior décède en 1957, Yves Saint-Laurent est désigné pour lui succéder et devient le plus jeune couturier du monde.
En 1961, il part de chez Dior et, avec le soutien et les conseils financiers de son ami Pierre Bergé, il ouvre sa propre maison.

Yves Saint-Laurent marque l’image des années 1960 :
En 1965, il crée ses robes chasubles avec des graphismes à la Mondrian et exploite le thème de la robe fourreau ornée d’un large motif (Mondrian, Poliakoff).
En 1966, sa collection printemps-été est influencée par les peintures de Warhol. Il réalise des robes pop art en jersey aux motifs linéaires de couleurs contrastées. Abondamment copiées, elle donnèrent le ton de la mode des années 1960 avec leurs lignes horizontales et verticales imprimées sur une robe droite coupée à angle droit. _ À cette époque, il va développer dans sa boutique Rive Gauche un style très en phase avec l’époque. Les tenues de style unisexe sont fait de tricot, les hauts sont extensibles et les combinaisons-pantalons d’une seule pièce comportent souvent une capuche rappelant les combinaisons des cosmonautes.
En 1968, il produit une robe transparente (très contestée) avec un chemisier en chiffon de soie uniquement couvert d’une plume d’autruche. Il fait également allusion aux étudiants contestataires avec des duffle-coats et des vestes à franges.
Le style de Yves Saint-Laurent, emprunt d’élégance, s’accommode souvent d’androgynie : smocking, tailleur pantalon pour les femmes.
Yves Saint-Laurent , en quête constante d’idées neuves, va renouveler sans cesse ses sources d’inspiration. Il va ainsi créer des collections d’esprit "mai 1968", puis d’esprit "rétro" (années 40 puis 30), d’esprit "exotique" (série des robes Bambara et robes des tropiques dégageant le nombril et mannequins portant des coiffures verticales, inspirées des costumes traditionnels africains).

Yves Saint-Laurent - Robes Mondrian - 1965

Yves Saint-Laurent - robe smocking - 1966

Yves Saint-Laurent - Tailleur-pantalon - automne-hiver 1966-67

Yves Saint-Laurent - Smoking bermuda - 1968

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Du flower power au punk (1968-1975)

Les années 1970 ne favorisent pas vraiment une nouvelle silhouette mais sont plutôt une période de transition.
Dans un premier temps, la mode devient décontractée et pratique. Les tenues sont un mélange de détente, de fluidité et de fantaisie. Elles s’agrémentent également souvent d’un style ethnique. Ainsi, prenant conscience du reste du monde, les gens adoptent une mode multi-culturelle.
Puis, à la fin des années 1970, le mouvement punk va développer une mode révolutionnaire aux antipodes des conceptions bourgeoises. Les vêtements affichent des caractéristiques à l’exact opposé de celle des hippies et des babas cool. La mode développe un aspect agressif, avachi et destructuré.

Envie de naturel

C’est aux États-Unis, à San Francisco en particulier, que naît le mouvement hippie. Le slogan Peace and Love séduit rapidement toute la jeunesse européenne. La mode va s’accorder du désir de vie plus facile et de retour à la nature. Les tenues se composent de jeans brodés, pantalons à pattes d’éléphant, chemises à fleurs, longues jupes exotiques venues d’ailleurs (les indiennes). L’émancipation féminine amène les femmes à largement emprunter au vestiaire masculin. Les coupes des vestes et des manteaux évoluent. La mode devient unisexe.

Jean Bousquet crée la grande marque de prêt à porter Cacharel à Nîmes en 1962 à tout juste 30 ans. Dès les débuts, le créateur s’oriente vers une optimisation de ses collections et développe une logique publicitaire globale et massive. Durant les années 70 et 80, les campagnes de pubs sont confiées à la célèbre photographe de mode Sarah Moon qui donne à la marque une image romantique, jeune et d’avant-garde.
La marque s’impose rapidement grâce à des produits comme la chemise pour femme, le crépon et relance les tissus liberty en 1967. La marque met en avant un style aux couleurs chatoyantes et aux motifs s’inspirant de l’Afrique et des pays d’Orient, rejetant ainsi le style classique et formel des générations plus anciennes.
Les produits commercialisés par la marque Cacharel ont un grand succès auprès d’une clientèle désireuse d’authenticité, de terroir et d’écologie.

Jean Bousquet et un de ses modèles

Cacharel - chemisier à fleurs sous une tunique et mini-jupe - v. 1970

Cacharel - imprimé liberty

Les premières créations de Sonia Rykiel sont des vêtement qu’elle crée pour elle-même : tricots, robes de femme enceinte ... En 1962, elle présente des vêtements pratiques. En 1968, elle ouvre sa propre affaire.
Ses robes de maille deviennent vite des classiques. Élégantes sans être tapageuses, elles sont en accord avec la vie quotidienne. Ses ensembles "coordonnés" correspondent également aux désirs des femmes. Selon leur humeur elles peuvent associer divers éléments d’une même gamme (cardigan, polo, jupe, robe, pantalon ...).
Ses tenues, réinterprétation moderne du tricot, s’accordent totalement de la mode des années 1970 qui prônent le confort, l’égalitarisme et l’authenticité. En effet, les matières sont sensuelles, les couleurs discrètes, les coutures sont apparentes, les ourlets sont sur l’endroit. Sonia Rikiel privilégie des contours asymétriques, les décors géométriques, les rayures et les oppositions simples. Ses vêtements en jersey épousent bien le corps, accentuant la sveltesse et la fragilité des femmes.

Sonia Rykiel - Collection prêt-à-porter - printemps-été 1972

Sonia Rykiel - Collection hiver 1976

Sonia Rykiel - Prêt-à-porter - printemps-été 1976

Depuis les années 1968, Jean-Charles de Castelbajac diffuse ses idées pop et pleines d’humour, aimant surprendre et abolir les frontières entre art et mode. En 1978, il crée sa propre marque.
En 1982, ses premières robes-tableaux voient le jour. Hervé di Rosa, Gérard Garouste, Ben et Jean Charles Blais vont collaborer avec Castelbajac en peignant directement sur les modèles du couturier. L’année suivante, il rend hommage à Mickey Mouse et à Louis XIV. En 1997, il dessine les habits du pape Jean-Paul II et de ses ecclésiastiques pour les journées mondiales de la jeunesse en France.
Jean-Charles de Castelbajac utilise de manière récurrente le détournement et taille ses vêtements dans des matières inattendues (velcro, serpillères ...).
Parmi ses pièces les plus célèbres, on compte les robes sacs confiées aux pinceaux de différents artistes contemporains, les manteaux en couvertures (en référence à Beuys), les blousons nounours.

Castelbajac - Tenues Pop

Castelbajac - Prêt-à-porter - automne-hiver 1985

Castelbajac - Pret-a-porter automne - hiver 1988

Kenzo est le premier styliste japonais à s’établir dans le monde européen de la mode dans les années 1970.
Ses tenues, jouant sur les contrastes, offrent une image optimiste, épanouie et bigarrée. S’appuyant sur la tradition japonaises, ses vêtement ne proposent cependant pas seulement une image folkloriquee. À la conquête d’un jeune public, il adapte le kimono, la veste courte, les grands drapés, mais redéfinit aussi le saroual, la djellaba, en leur associant des couleurs joyeuses et intenses et de grands motifs floraux (qui constituent, d’ailleurs, sa marque distincte).

Kenzo - Collection prêt-à-porter - automne-hiver 1971

Kenzo - octobre 1972

Le style Punk

À la fin des années 1970, les jeunes sont en révolte. Le slogan No Future est révélateur de leur désœuvrement. Adeptes d’un rock agressif (The Sex Pistols, The Clash, The Damned) et vomissant la vision angélique de la société des hippies, ils adoptent un style agressif. Leurs tenues se situent en tout point à l’opposé de celui des babas cools. Ils ont des cheveux plutôt courts hérissés de pointes et teints de couleurs criardes, anti-naturelles. Leur maquillage est outrancier, dégoulinant et sale, et ils développent une esthétique opposée au naturel prôné par les babas. Ils portent du cuir moulant, des tee-shirts lacérés ou déchirés et ont aux pieds des Doc Martens ou des chaussures aux talons aiguilles.

Nina Hagen - Icône punk des années 80

Cette créatrice, qui commence avec son mari Malcolm McLaren, développe dans les années 1970 un style déstructuré qui trouve sa clientèle chez les groupes underground de l’époque. Vivienne Westwood habillera ainsi les Sex Pistols et va être une actrice majeure de la mode anglaise en répandant le style punk. Elle va ainsi affirmer un style anti-establishment, anti-conformiste et rebelle, et refuser toute idée de bon goût.
Tenues de cuir ou de latex décorés de chaînes ou de zips, tee-shirts troués imprimés de slogan punks ou pornographiques, accessoires issus des courants masochistes, ses modèles vendus dans sa boutique Sex, jouent sur la provocation.
Les tenues de Vivienne Westwood révèlent toujours son esprit rock et provoquant auquel se mêle le glamour. En 1982, elle édite des bustiers de satin à porter au-dessus de sweat-shirts, un des premiers exemple de sous-vêtements portés au-dessus. Dans sa collection Mini-Crini en 1986, elle utilise des chaussures à semelle compensée qui deviennent une référence dans la mode des années 90. La couturière revisite les styles vestimentaires anglais avec irrévérence, en exploitant par exemple régulièrement le tartan, en travaillant avec le mohair ou en incluant le kilt dans certaines tenues.
Ses vêtements sont riches de référence historiques, notamment du 17ème et 18ème siècles. En 1990, dans sa collection portraits, Vivienne Westwood fait imprimer des scènes tirées du Berger contemplant une bergère endormie de François Boucher.
Son goût pour l’excentricité et la provocation se retrouve aujourd’hui chez John Galliano, Alexander McQueen, ou encore Viktor & Rolf.

Malcolm Mc Laren et les Sex Pistols et la boutique SEX

Vivienne Westwood dans les années 70

Vivienne westwood - Tenue punk

Vivienne Westwood - automne-hiver 1996-97

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Les années fric et frime (1976-1988)

Les années 80 sont le symbole d’un consumérisme acharné. On érige la réussite en religion, le statut social en culte. Les logos, les griffes dénotent d’une réussite confirmée en s’affichant de façon ostentatoire. On célèbre le luxe et la mode devient un marqueur social.
Tout est basé sur le paraître. Les vêtements sont excentriques, se teintent de couleurs saturées, voire fluorescentes. Les motifs, les détails sont nombreux. Pois, rayures, strass, paillettes ornent les tenues. Les accessoires explosent et les modèles se couvrent de boucles d’oreilles et de bracelets oversize.
Le corps devient le maître-mot. On pratique le sport, on suit des régimes, on consomme des vitamines, des anabolisants, on a recours à la chirurgie esthétique. Les vêtement doivent désormais sublimer ce corps et les créateurs vont en forcer le trait. Ainsi, les épaules s’élargissent, les jambes s’allongent, la taille s’affine, les seins se gonflent ... Le lycra rend élastique les matières qui épousent désormais le corps et montre l’anatomie.

En 1977, Thierry Mugler développe un style à contre-courant des tendances folkloriques ou déstructurées du moment. Créant sa propre griffe, il revendique l’élégance féminine et initie une coupe révolutionnaire où la silhouette est fortement stylisée.
Créant une femme conquérante et sensuelle, il exagère les formes féminines. Ses modèles sont très structurés. Les tailles sont étranglées et ce resserrement est encore plus accentuées par des empiècements colorés sur les côtés. Les poitrines sont sculpturales, les pantalons et jupes ultra-moulants.
Les tenues de thierry Mugler font des clins d’œil fréquents à la mode fétichiste, utilise les clichés érotiques et renforce de cette façon l’image de la femme dominatrice.
Visionnaire, Thierry Mugler innove aussi bien dans les formes que dans les matières. ses créations exubérantes s’accordent ainsi de cuir, de métal, de latex ou de fourrure.
Amoureux de la scène et du show, il est à l’origine des costumes de Mylène Farmer et du Cirque du soleil.

Thierry Mugler blouson de cuir brodé de sequins - années 80

 Thierry Mugler - années 1980

Thierry Mugler - Ensemble en crêpe de laine rose - 1983-84

Claude Montana, dans la mouvance futuriste de Mugler, propose dès la fin des années 1970, des silhouettes à l’opposé de celles de la décennie. Dès 1978, lorsqu’il ouvre sa propre maison, les vêtements du créateur affichent déjà l’ampleur des années 1980.
Le défilé de cette année fait scandale, la presse voyant des réminiscences néo-nazies dans les modèles sculpturaux présentés autour d’une mise en scène orchestrée avec excessivement de rigueur, où chaque élément a son importance et où tout superflu est éliminé.
Cette rigueur s’exprime également dans les tenues que Montana propose. Les formes sont épurées, fortement architecturées autour de cols et d’épaules proéminents. Les coupes sont sévères et les détails sont savamment pensés pour ne pas déséquilibrer la structure volumique de vêtement.
Claude Montana utilise avec efficacité des matériaux bruts et nobles, et plus particulièrement le cuir qu’il a appris à travailler en 1971 chez Mac Douglas. Mais, là encore, sa rigueur s’impose pour le choix des tissus et des coloris, préfigurant le minimalisme de certaines créations des années 1990 et 2000.

Claude Montana - Années 1980

Claude Montana - blouson de cuir clouté porté par la princesse Stéphanie de Monaco - 1985

Claude Montana - 1988

Jean-Paul Gaultier apprend son métier chez Cardin et Patou.
C’est dans les années 1980 qu’il se fait véritablement connaître et qu’il est fortement médiatisé en habillant Madonna pour sa tournée Blond Ambition Tour. Il façonne pour la chanteuse une spectaculaire tenue de scène où le dessous devient un vêtement du dessus. Le vêtement créé garde l’aspect traditionnel d’un corset, grâce notamment au satin de soie rose dont il est constitué. Cependant le système du corset est totalement repensé. Les piqûres des bonnets ne sont pas concentriques, le corset est muni de bretelles et est ceinturé, les jarretelles ne servent à rien puisque la chanteuse porte des collants.
Le travail de Jean-Paul Gaultier, très fantaisiste, joue beaucoup sur cette inversion dessous/dessus : il crée des vestes-lingerie, des vestes-body, des robes à corsets lacés. Lors de sa collection de l’hiver 1985, il affuble ses modèles de seins en forme d’ananas, exacerbant les spirales des gaines et des soutien-gorges d’après-guerre, faisant référence en cela aux créations de la maison Wacaol qui plaçait des spirales métalliques dans les bonnets de ses sous-vêtements pour mieux faire pointer les seins.
Jouant de la provocation, Gaultier tourne en dérision les poncifs masculins/féminins et exagère les attributs de la sexualité. En 1984, il crée la mode du Boy-toy, cet "homme-objet" en marinière qui deviendra un des classiques du créateur. Il fait défiler des hommes portant des jupes et donne à l’unisexe ses notes de noblesse.
L’enfant terrible de la mode française joue beaucoup des lieux communs, s’accaparant, récupérant et transformant les signes du pouvoir, du sexe, de la séduction, de l’argent, de la religion...

Jean-Paul Gaultier - Bustiers

Jean-paul Gaultier - Bustier - 1984

Jean-Paul Gaultier - 1986

Jean-Paul Gaultier - Boy Toy

Azzedine Alaïa suit une formation en sculpture aux Beaux-Arts de Tunis. En 1981, il lance sa marque et en 1982, il travaille pour Dior et fait son premier défilé.
Affectionnant les matériaux qui épousent naturellement le corps, il moule étroitement la silhouette de cuir, lainage, toile de lin, tissu éponge, stretch. Il propose des blousons extrêmement structurés, des bustiers moulants, des robes lacées révélant un côté du corps. Sculpteur de formation, Azzedine Alaïa travaille à même le corps afin d’exalter la prestance du mannequin et magnifier la femme qui porte le vêtement.
Ses toilettes, éminemment structurées seront particulièrement représentées à travers la silhouette féline du modèle Grace Jones.

Azzedine Alaïa - Prêt-à-porter automne-hiver 1989

Azzedine Alaïa - Prêt-à-porter automne-hiver 1989

Azzedine Alaïa et Grace Jones

Couturier allemand, Karl Lagerfeld fait son apprentissage chez Balmain et Patou. À la fin des années 70, ses tenues suivent la mode disco. Depuis 1983, il travaille chez Chanel et, en parallèle de son travail pour la grande marque, Lagerfeld lance sa propre maison dont l’activité s’arrête en 1997.
Grâce à lui, Chanel redevient une griffe culte. tout en respectant les éléments traditionnels de la maison, Lagerfeld innove et s’inscrit pleinement dans la décennie. Il raccourcit les jupes, utilise le cuir et base le nouveau style de la maison sur le contraste noir/blanc. Le créateur travestit les chaînettes originelles de Chanel (qui servaient à lester le bas de ses tailleurs) et en fait de grosses ceintures dorées et de colliers dans le plus pur style des années 80. Le logo de la marque (monogramme CC) devient très visible.
Les vêtement du couturier sont ostensiblement luxueux. Il assortit ainsi des bustiers scintillants et des vestes courtes, orne ses créations de broderies voyantes, et pare ses modèles de bijoux fantaisie.

Karl Lagerfeld pour Chanel - Tailleur en lainage rose - 1986

Karl Lagerfeld - tailleur Chanel - années 80

Karl Lagerfeld pour Chanel - années 80

La mode venue du Japon

Les années 1980 voient aussi l’arrivée d’une nouvelle génération de stylistes japonais.
Ces jeunes créateurs, issus d’une culture à forte tradition et, en même temps, désireuse de modernité, suivent bien sûr les traces de leurs "maîtres" Kenzo Takada et Issey Miyake.

Le style d’issey Miyake est marqué par les formes du vêtement traditionnel japonais mais se nourrit également d’influences occidentales.
Travaillant avec prédilection le plissé, Issey Miyake fait référence à l’origami mais suit également le travail de Mariano Fortuny. Cependant, même si son travail s’appuie sur les enseignement de ce grand couturier du début du siècle, il n’utilise pas la traditionnelle soie, mais plutôt des tissus synthétiques aux couleurs intenses. Ses vêtements permettent la flexibilté et le mouvement des porteurs et facilitent l’entretien et la production. Cela aboutit finalement à une nouvelle technique de fabrication présentée à travers une série appelée Pleats Please. Les vêtements sont d’abord coupés et cousus puis, pris en sandwich entre deux couches de papier, ils sont introduits dans des presses chaudes où il se plissent. Lorsque ces tenues sont enfin libérées de la presse, le tissu garde en mémoire les plis et sont prêts à être porter.
Issey Miyake multiplie les innovations et créer des tenues aux tissus froissés, compressés, rétrécis... Il va également utiliser des matières totalement étrangères au monde de la mode telles que le plastique, le fil de fer (rappelant les armures de samouraïs), le papier, l’osier.
Originaux, ses vêtements d’influence japonisante peuvent être légers, souples ou sculpturaux, simples ou complexes, jouer de matières archaïques ou technologiques, être déclinés en robes, jupes, pantalons, en vestes ou en tee-shirts.

Issey Miyake - années 1980

Issey Miyake - Veste kimono

Issey Miyake - Combinaison

Issey Miyake - Bustier - 1980

Yohji Yamamoto présente sa première collection de prête-à-porter en 1977 à Tokyo et organise son premier défilé à Paris en 1981.
Ses vêtements sont amples, souvent volumineux et affichent généralement un caractère multifonctionnel. Certaines de ses vestes sont ainsi réversibles grâce à des poches et à des lacets supplémentaires.
Ses créations tiennent davantage de la sculpture que de l’habit. Les coupes sont disproportionnées, les volumes géométrisés. À l’origine du Déconstructiviste, Yamamoto enveloppe les corps de courbes aux proportions exagérées et de volumes distendus et définit des formes asymétriques. Le corps semblent cachés, perdus dans leurs tenues et Yamamoto estompe les différences homme/femme à travers une esthétique asexuée.
Sa palette de couleurs est très épurée et oppose souvent le noir et le blanc.

Yoshi Yamamoto

Yohji Yamamoto - robe jumper - 1988-89

Yohji Yamamoto - prêt-à-porter

Rei Kawakubo est plus connue à travers le nom de sa marque Comme des Garçons .
Elle lance sa première collection en 1981 à Paris. La presse acclame ses créations androgynes aux coupes amples et asymétriques et qualifie les lignes de Comme des Garçons de "Hiroshima chic". Alors que la mode parisienne des années 1970 est chatoyante, Kawakubo propose des vêtements aux allures presque misérables, sans véritable forme, et sont systématiquement monochromes, faisant exclusivement appel au gris, au beige et au noir. En 1982, elle crée le pull dentelle constellé de trous semblant attaqués par des mites.
À l’opposé des représentations corporelles et vestimentaires occidentales, ces créations sont difformes et ne suivent pas les lignes naturelles du corps. Les tenues de Kawakubo semblent ne respecter aucune des conceptions d’harmonie habituelles mais, loin de contredire le corps, elles se structrurent autour de celui-ci, comme des sculptures indépendantes.
En 1989, Kawakubo introduit la couleur dans ses créations. En 1997, sa collection est faîte de robes agrémentées de bosses, de nodules et d’excroissances matelassées. Là encore, elle remet en cause les habitudes esthétiques vestimentaires et fait l’impasse sur l’histoire du costume occidental.
Depuis le début de Comme des garçons, sa communication échappe également aux standards du graphisme. Les cartons d’invitation, les catalogues de collection et tous les documents visuels produits sont , à l’image des créations vestimentaires de la marque, des éléments destructurés, décomposés afin d’être de véritables vecteurs de sens.

Kawakubo - Comme des garçons - collection 1986-87

Kawakubo - Comme des garçons - 1997

Kawakubo - Comme des garçons - 2010

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Recyclage des basiques (les années 1990)

Pendant les années 1990, la société est placée sous le signe de la récession et du chômage.
L’époque est au refus de toute exagération. Les vêtements à logo sont délaissés, les tailleurs sont remplacées par des tenues basiques. On se détourne des coiffures volumineuses et des rembourrages d’épaules.
L’authenticité est le maître-mot de cette décennie. Il s’agit avant tout d’être soi-même. On ne s’habille plus selon une image déterminée par un créateur, mais chacun détermine son propre "concept" d’habillement en mélangeant les genres. Le culte du corps devient le culte de soi. Chacun s’applique à cultiver son individualité, sa personnalité, sa propre identité.
Les codes vestimentaires s’assouplissent et il est désormais possible de combiner différents niveaux de design. Cet écclectisme se retrouve à tous niveaux. Jil Sander, Prada, Helmut Lang développent une mode minimaliste, épurée. Versace, Dolce & Gabbana Christian Lacroix proposent quant à eux des modèles où le faste perdure. On trouve également dans les tenues développées alors des créations rétro, le style grunge, le look "Spice-Girl", la mode techno.
La haute couture est à l’image de cette diversité et propose une diversité stylistique et une variété de propositions.

Après un passage chez Hermès et Patou, Christian Lacroix ouvre sa maison en 1987. Il acquiert une renommée internationale grâce à sa garde-robe extravagante, riche en détails, aux mélanges de couleurs et d’imprimés originaux.
Le style Lacroix est un mélange grandiloquent de cultures, d’époques et de couleurs. Ses crétions sont fortement inspirées par l’Angleterre (paysages sombres, lainages marrons, dandysme) et par l’Espagne (corridas, couleurs chatoyantes), mais aussi par Venise, le XVIIIème siècle, les contes de fées et les paysages de son enfance.
Pour Christian Lacroix, le luxe n’a rien de honteux. Aussi va-t-il développer une mode de la somptuosité et de la profusion. Il mêle ainsi sur un même modèle différents imprimés, broderies et bijoux, tout en lui conservant une sophistication très classique.

Christian Lacroix - Robe du soir Victoria - 1992-93

Christian Lacroix - esquisse automne-hiver 1996-97

Christian Lacroix

Christian Lacroix

Personnage excentrique, iconoclaste, au look délirant, John Galliano est un dandy narcissique et provocateur. Il se distingue dès sa première collection par des créations novatrices et extravagantes. En 1984-85, sa collection Jeux dangeureux montre des vestes pouvant être portées comme des pantalons et des jupes et des modèles à la coupe circulaire. En 1992, il élit résidence à Paris et, en 1995, est nommé directeur de la création chez Givenchy. En 1996, il passe de Givenchy (Alexander McQueen le remplace à la tête de cette maison) à Dior qu’il replace sur le devant de la scène. En 2003, il ouvre sa propre boutique, tout en continuant son activité chez Dior.
Ses crétions affichent un romantisme flamboyant et caractérisées de coupes en biais et d’étoffes malmenées.
Chacune de ses collection raconte une histoire, s’inspire d’évènements historiques, de personnages ou de pays lointains. Ses créations d’inspiration historique sont étudiées jusque dans le moindre détail. En 1994, pour sa collection automne-hiver, il réalise des robes aux lignes pures inspirées des modèles des années 20 et, pour son défilé printemps-été, des jupes droites, reflets de celles des années 1950. En 1996, il présente pour Givenchy des jupes de style crinoline du XVIIIème siècle, et en 1997 il présente une robe reprenant le motif de l’Union Jack.

John Galliano

John Galliano - Collection automne-hiver 2009-10

John Galliano - automne-hiver 2009-2010

À l’instard de Jean-Paul Gaultier pour la France, Alexander McQueen est appelé L’enfant terrible de la mode anglaise. Il définit lui-même son style d’"électrique et excentrique" qualificatifs auxquels peuvent s’ajouter ceux de choquant, gothique et baroque. En effet, Alexander McQueen bouscule sans cesse les conventions et autres diktats de la mode. Il veut provoquer des réactions à chacune de ses collections, qui s’enchaînent sans jamais se ressembler. En 2002 par exemple, ses modèles sont vêtues en écolières sexy et malicieuses. En 2003, son défilé présente des pirates en naufrage.
Son travail, à l’instard de l’image qu’il renvoie de lui-même, est théâtralisé. Tout est bon pour faire parler de sa maison. En 1994, il fait ainsi défiler Aimée Mullins, top modèle amputée des deux jambes. Présentant cinq colections par an, il les montre à Londres à travers des défilés à la mise en scène plein de panache.
Alexander McQueen accorde une importance particulière à la construction de ses vêtements en alliant des coupes modernes et anciennes, des tissus légers et des éléments structurés.
Le couturier a signé des pièces devenues désormais incontournables : pantalon taille-basse, foulard tête de mort. Il s’approprie également les grands classiques du style british et les détourne. Le tartan est ainsi très présent dans ses créations. On lui doit aussi le retour du pied de poule et la démocratisation de l’imprimé psychédélique.
Ses tenues sont marquées par le romantisme et la mélancolie, et présentent toujours un caractère original, comme l’illustrent ses pièces inspirées du monde animalier.

McQueen et Isabella Blow pose pour Vanity Fair

McQueen pour Givenchy-haute-couture-1997

Alexander McQueen - atomne-hiver 2009

Alexander McQueen - Chaussures Armadillo - 2010

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Mondialisation et conceptualisation (2000 et après...)

La mode de la fin du XXème et du début du XXIème siècles est à la mondialisation, particulièrement avec l’émergence des Belges Martin Margiela, Dries van Noten, Ann Demeulemeester..., l’Autrichien Helmut Lang, l’Allemande Jil Sander, l’Américain Marc Jacob, les Britanniques Hussein Chalayan, John Galliano et Alexander McQueen. Les investisseurs sont internationaux et les marques construisent désormais un concept global autour d’un styliste phare.
Des expériences aussi diverses que le nombre d’entreprises du luxe voient le jour. Allant parfois jusqu’au concept, certains créateurs priviligient la réflexion et le discours, se rapprochent de certains modèles de l’art contemporain et développent des défilés correspondant à des happenings, rendant ténue la frontière entre art et mode.

Ce Belge qui a commencé comme assistant de Jean-Paul Gaultier, crée sa maison en 1988. Anticonformiste, la presse qualifie son style de "déconstruit".
Contrairement à beaucoup d’autre designers, il évite le culte de la personnalité. Il n’est jamais pris en photo, ne répond jamais directement aux interviews et réagit aux questions des journalistes par fax interposés. Même sa griffe est volontairement impersonnelle. Ainsi, les étiquettes de ses vêtements affichent-elles seulement un chiffre noir compris entre 0 et 23 sur fond blanc. Chacun de ses chiffres sert juste à indiquer la ligne à laquelle l’objet appartient (ligne artisanale : 0 ; vêtement pour femme : 6 ; vêtement pour homme : 10 ; chaussures : 22 ; objets et éditions : 13 ; etc.).
Faisant de son principe l’idée qu’on ne doit pas jetter mais transformer, Margiela est le père du Work in progress. Dans un style déconstructiviste, il a fait sa spécialité de la séparation de pièces de vêtements afin de les assembler autrement. Il récupère par exemple des chaussettes des stocks de l’armée qui sont décousues et assemblées en pulls-over. Un pantalon à pinces devient une jupe. Une housse d’emballage en plastique se métamorphose en haut porté sur robe. Les pièces de Margiela sont uniques et totalement artisanales. Ses récupérations vont l’amener à créer un manteau avec des guirlandes de noël, un boléro avec des chapeaux, une robe de soirée avec deux vieilles robes.
Si les mécanismes de création développés par Margiela sont totalement novateurs, ses tenues conservent toutefois un certain classicisme, particulièrement au niveau des couleurs. Martin Margiela privilégie le blanc, le noir ou l’utilisation de demi-teintes.
le couturier cotoie de prêt d’autres créateurs du monde de la mode, particulièrement MarinaWee, fondatrice de la Bande des six d’Anvers regroupant Dries van Noten, Ann Demeulemeester, Walter van Beirendonck, Dirk van Saene et Dirk Bikkembergs.

Martin Margiela - Veste fabriquée avec des sac de l'armée suisse - 2006

Martin Margiela - Printemps 2009

Martin Margiela - printemps-été 2009

La marque Dries van Noten apparaît en 1986.
Le travail du créateur est caractérisé par des imprimés nombreux, inspirés des costumes et du folklore de pays tels que le Maroc, l’Inde, l’Egypte, le Japon. Ses inspirations ethniques l’amènent également à parer ses vêtements de broderies et de perles travaillées selon les techniques traditionnelles de ces pays.
Ayant une forte intuition de la couleur, Dries van Noten utilise des teintes chaudes, fauves.
Même s’il expérime constamment les textiles et les techniques décoratives, jouant de teintures diverses et employant souvent des matières originales telles que le léopard, le crocodile ou le cuir, la démarche du couturier reste pragmatique.

Dries van Noten - 2008

Dries van Noten - 2008

Dries van Noten - 2009

Ann Demeulemeester, amie de Patti Smith, développe ses créations dans un esprit rock. Parmi les standadrds qu’elle affectionne, on peut citer les blousons de motard, les blasers ...
Ses créations explorant le conflit masculin/féminin et opposant dureté du rock avec douceur et sensualité, alternent entre esprit déconstructiviste et romantisme fin de siècle. Elle aime ainsi travailler les matières naturelles (le cuir, la laine, la flanelle, la fourrure) et laisser délibérement les finitions brutes.
Le noir et le blanc sont quasiment omniprésents. Mais, chez Ann Demeulemeester, plutôt que d’être de simples couleurs, ces teintes servent à définir le volume du vêtement et révéler un caractère particulier.

Ann Demeulemeester - automne-hiver 2008

Ann Demeulemeester - printemps 2009

Ann Demeulemeester - printemps 2009

Walter van Beirendonck présente sa première collection Sado en 1982. Depuis, il développe un univers très visuel, s’inspirant de la rue, de la BD, des comics américains, de la science-fiction, de la culture cyber-punk... et propose des spectacles volontairement provocateurs, dérangeant, voire même choquant, tout en étant joyeux.
Défenseur du Safe-sex pronant les rapports sexuels protégés, le couturier inclut volontiers des logos et des graphismes faisant écho à la sexualité. Il joue avec les références érotiques, voire sadomasochistes, teintées d’humour.
Innovant constamment, il mêle aux textiles d’autres matériaux et juxtapose des couleurs et des motifs violemment contrastés
Walter van Beirendonck développe des coupes strictes qui deviennent soudainement déstructurées et propose une démarche hors-norme pouvant faire penser à une résurgence de l’anti-mode.

Walter van Beirendonck - hiver 2004-2005

Walter van Beirendonck - automne-hiver 2009

Walter van Beirendonck - été 2010

Viktor Hosting et Rolf Snoeren se sont rencontrés pendant leurs études à l’Académie d’Art d’Arnhem aux Pays-Bas. En 1998, ils présentent leur premier défilé de haute-couture où ils développent une vision expérimentale de la mode.
Reconnus pour leurs créations s’inscrivant dans un univers extravagant, fait de fantaisie et de démesure, ils développent cet aspect en cultivant avec humour leur ressemblance. Ils présentent ainsi la même silhouette, portent les mêmes lunettes et les mêmes moustaches.
Ils détournent les classiques tels que les robes, les trenchs ou les vestes pour en faire des pièces originales, élégantes et ludiques à la fois. Ils proposent des coupes déstructurées, d’immenses volumes, et affichent un amour pour les volants.
Leurs défilés, véritables happenings, mêlent mode et art. En 2000, le défilé Russian Down est basé autour d’un seul mannequin que les créateurs viennent habiller sur l’estrade. En 2006, le défilé Upside Down se passe sur un podium inversé et commence par le final. En 2007, les modèles portent d’amples robes déployées en éventail, accrochées à une structure métallique et éclairées par des spots. Les femmes sont alors des pantins suspendus, chaussés de sabots colorés ou blancs.
En 2005, Viktor and Rolf ouvrent leur première boutique à Milan. À l’image de leurs créations, le décor est totalement à l’envers.

Boutique Viktor and Rolf

Viktor and Rolf - hiver 2008

Viktor and Rolf - automne-hiver 2008-09

Viktor & Rolf prêt-à-porter printemps-été 2010

Britannique d’origine turque, Chalayan, à travers ses créations, se concentre sur la façon dont fonctionne le corps au sein du monde qui l’entoure. Il interroge ainsi ce corps dans son espace physique (volume, environnement) ou son contexte socio-culturel (l’image de la femme occidentale, de la femme musulmane...).
Les collections de Chalayan tournent souvent autour des thèmes du déplacement et de l’identité, de l’isolement et de l’oppression. En 2000, lors de son défilé Living room, ses mannequins sont amenées à convertir des meubles (table basse, fauteuil) en vêtements, illustrant les impermanences des foyers et des familles forcées de fuir lors de guerres. Dans une autre collection (printemps-été 98), soulignant les contraintes imposées aux femmes par la religion musulmane, Chalayan crée des tchadors de différentes longueurs sans rien dessous afin d’attirer l’attention sur le fait que, sous ses tenues, existent de femmes qui vivent et respirent.
Hussein Chalayan fait également régulièrement appel aux nouvelles technologies. Pour Remote control Dress, il présente une robe qui s’ouvre et se ferme, se transforme à l’aide d’une télécommande. Le futurisme de ses créations est également visible dans ses Led Dresses, tenues illuminées.
Ses défilés, délaissant la présentation traditionnelle des modèles au profit de mises en scène spectaculaires, abolissent les frontières entre mode, design et performance et développent volontairement des images provocantes pour susciter une réflexion sur notre identité et pour retenir notre attention. Les créations de Chalayan ont même fait l’objet d’une rétrospective au Groninger Museum, l’un des plus importants musées néerlandais et haut-lieu reconnu dans le monde de l’art.

Hussein Chalayan - collection Between - 1998

Hussein Chalayan - automne-hiver 2000

Hussein Chalayan - 2006

Hussein Chalayan - printemps-été 2008

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